
Le 1ᵉʳ avril 2025, j’ai eu l’opportunité d’assister à la soirée EY Sustainable Future, organisée dans le cadre inspirant du Musée du Quai Branly – Jacques Chirac, à Paris. Un lieu chargé d’histoire pour évoquer un sujet qui, plus que jamais, regarde vers l’avenir : la transformation durable de nos entreprises et de nos modèles économiques.
Sommaire
1. 🌱 Un sujet d'une brûlante actualité
2. 💡La Data n'est pas neutre : le rôle clef de la sobriété
4. 🤔 Comment transformer des process en autant de leviers de confiance et de performance.
5. 👩🏻💻👨🏻💻 Diriger une entreprise tech aujourd'hui
1. 🌱 Un sujet d'une brûlante actualité.
C’est Alexis Gazzo, associé EY Sustainability, qui a introduit la soirée en rappelant une évidence qu’on oublie parfois : la transition écologique n’est pas une option, elle est une nécessité – stratégique, opérationnelle, existentielle. Son propos, à la fois lucide et engagé, a posé le cadre : comment transformer l’incertitude en action, et surtout, comment conjuguer performance économique et impact positif ?
Les échanges qui ont suivi ont été aussi denses qu’inspirants : économistes, dirigeants d’entreprise, investisseurs et acteurs de la société civile se sont succédés pour aborder des sujets allant de la perception du risque et de l’incertitude par le cerveau humain, à l’alignement stratégique des entreprises avec les limites planétaires, en passant par le rôle du leadership dans un monde instable et secoué par les coups de boutoir de la nouvelle administration américaine.
En tant que dirigeant d’une entreprise technologique spécialisée dans la data, cette soirée m’a confronté à une évidence : nous, acteurs de la tech, avons une responsabilité directe dans cette transformation. Nos algorithmes, nos outils de segmentation, nos plateformes de marketing automation façonnent les relations entre les marques et leurs clients. Et donc, leur empreinte écologique, sociale, émotionnelle.
Chez Fourseeds, cette conscience ne date pas d’hier. Elle se traduit dans des engagements concrets : une certification Afnor VP2 pour garantir la conformité RGPD, des travaux de recherche avec des enseignants de l’Inria pour réduire la pression commerciale exercée sur les consommateurs, et une volonté claire : mettre la donnée au service de la responsabilité.
Cette soirée n’a pas changé ma vision. Elle l’a ancrée. Et m’a donné envie de la partager.
2. 💡La data n’est pas neutre : le rôle clé de la sobriété.
Parmi les interventions marquantes de la soirée EY Sustainable Future, une idée a particulièrement résonné avec moi : nos outils ne sont pas neutres. Les données que nous collectons, analysons et exploitons façonnent notre façon de communiquer, de vendre, de décider. La donnée est un levier de performance, certes. Mais c’est aussi une matière sensible, qui peut générer de la valeur comme de la saturation.
Aujourd’hui, la plupart des entreprises collectent plus de données qu’elles n’en utilisent réellement. Cette surcharge informationnelle déborde ensuite sur les clients, sous la forme de sollicitations répétées, d’emails quotidiens, de push notifications mal ciblés. Derrière l’apparente personnalisation se cache bien souvent une forme de pression commerciale, parfois invisible mais réelle, qui finit par user la relation client et dégrader la perception des marques.
Ce phénomène n’est plus seulement un enjeu d’efficacité marketing : il devient un sujet éthique. C’est l’un des enseignements majeurs de la soirée du 1ᵉʳ avril. Alors que les consommateurs réclament plus de transparence, plus de contrôle et plus de respiration, continuer à piloter sa stratégie CRM comme on le faisait il y a dix ans relève presque de l’aveuglement. Il ne suffit plus d’automatiser les campagnes : il faut repenser leur finalité, leur fréquence, leur sens.
Chez Fourseeds, cette prise de conscience est au cœur de notre accompagnement. Nous aidons les directions marketing à équilibrer performance business et respect de la relation client. Cela passe par des outils, mais aussi par une culture data différente : une culture qui valorise la pertinence plus que le volume, la fidélité plus que le taux d’ouverture, la qualité de l’interaction plus que sa répétition.
Concrètement, notre plateforme permet de mesurer et d’analyser la pression commerciale exercée sur chaque contact, en temps réel. Nous croisons les sollicitations omnicanales (emails, SMS, notifications, call center, etc.) pour identifier les points de saturation. À partir de là, nos moteurs de règles permettent aux équipes CRM de construire des parcours plus intelligents, plus fluides, plus respectueux.
Mais nous allons plus loin. Avec des enseignants-chercheurs de l’Inria, nous avons lancé un programme de recherche appliquée sur la modération algorithmique. L’idée est simple : construire une IA éthique by design, capable de prévenir la sur-sollicitation avant qu’elle n’advienne. Non pas en ralentissant artificiellement les campagnes, mais en les calibrant intelligemment en fonction du comportement réel et du consentement de l’utilisateur.
C’est un changement de paradigme : on ne parle plus seulement de performance marketing, mais de sobriété informationnelle. Une sobriété qui ne s’oppose pas à l’efficacité, mais qui l’ancre dans une vision durable de la relation client.
En sortant de la soirée EY, une chose m’est apparue clairement : la data, si elle est bien utilisée, peut devenir une force de modération. Et cette modération n’est pas un frein à la croissance — c’est même son futur fondement je pense.

3. 🎤 Synthèse des conférences.
La conférence du 1er avril sur la transition durable a été marquée par des échanges stimulants, vifs et sans langue de bois abordant les défis de la durabilité dans le contexte économique et politique actuel.
Gwenaëlle Avice Huet, DG Europe de Schneider Electric, a souligné le paradoxe auquel les dirigeants sont confrontés : l’équilibre entre la compétitivité et la durabilité. Elle a exprimé sa frustration face à la manière dont la durabilité devient un « gros mot » ; elle est souvent opposée à des préoccupations de court terme, comme la défense ou la compétitivité. Pour elle, il est impératif de maintenir une vision à long terme qui intègre la durabilité sans sacrifier la compétitivité. Elle a également mis en avant le rôle crucial des investissements dans la transition énergétique, un secteur où Schneider Electric a su démontrer que l’engagement pour la durabilité pouvait être un pari gagnant. L’entreprise a progressivement construit une stratégie de durabilité en intégrant l'efficacité énergétique à travers des acquisitions et des pratiques de sustainability sur le long terme.
Alexandra Palt, Présidente du WWF, a insisté sur la nécessité de réconcilier les enjeux économiques et écologiques. Elle a critiqué le manque de narratif cohérent autour de la transition écologique, soulignant que celle-ci ne devait pas être vue comme un enjeu idéologique, mais comme un sujet vital qui touche à la sauvegarde de notre patrimoine naturel et de notre avenir. Elle a insisté sur l’importance de faire comprendre à tous, citoyens et entreprises, que la transition écologique est une question de destin commun, et non un choix politique. Le changement climatique, selon elle, ne concerne pas seulement les générations futures ou les populations lointaines, mais bien chacun d’entre nous, car nous faisons tous partie de cet écosystème mondial en danger. Elle est revenue sur les prises de position des dirigeants qui sont souvent d'avantage des discours de bienséance sans véritable
Enfin, Ludovic Subran, Chief Economist et Directeur des Investissements chez Allianz, a rappelé que la durabilité, pour l’instant, est souvent perçue par les dirigeants comme un moyen de gérer les risques (réputationnels, physiques, juridiques) plutôt que de créer de la valeur. Il a souligné que la transparence et la compréhension des consommateurs étaient cruciales pour faire évoluer les mentalités. Par ailleurs, il a observé qu'il existait une fracture générationnelle : les jeunes générations sont souvent vues comme plus enclines à adopter des comportements écologiques, mais il est important de se rappeler que tous les consommateurs ne partagent pas cette vision. La durabilité doit donc être un effort collectif, impliquant à la fois les entreprises, les consommateurs, et les dirigeants.
L’un des points forts de la discussion fut la reconnaissance de la nécessité de repenser le narratif autour de la durabilité. Au lieu de l’opposer à l’économie ou à la politique, il est crucial de l'intégrer de manière transversale dans tous les secteurs, en l’orientant vers la création de valeur durable. Cela passe par une meilleure éducation des consommateurs, un engagement des dirigeants et des investissements stratégiques pour une durabilité à long terme.
En résumé, la transition durable doit être vue comme un enjeu stratégique à long terme pour les entreprises et les nations. Les dirigeants doivent naviguer habilement entre les exigences économiques immédiates et la responsabilité de garantir un avenir viable pour les générations futures, tout en adaptant leur communication pour toucher et engager l’ensemble des parties prenantes.

4. 🤔Comment transformer des process en autant de leviers de confiance et performance.
À l’heure où les débats sur la régulation des intelligences artificielles et de l’économie numérique s’intensifient, la question de la conformité réglementaire revient sur le devant de la scène. Et trop souvent, elle est encore perçue comme une contrainte. Un passage obligé. Une case à cocher. Or, lors de la soirée EY Sustainable Future, une vérité a été rappelée avec force : la régulation n’est pas un frein à l’innovation. C’est son cadre de légitimité.
Chez Fourseeds, cette conviction structure notre stratégie depuis plusieurs années. En 2024, nous avons fait le choix de nous soumettre à un processus rigoureux de certification, qui nous a valu d’obtenir le label Afnor VP2, une distinction encore rare dans l’écosystème des plateformes data. Cette certification atteste de notre conformité aux exigences du RGPD, mais va plus loin : elle garantit la traçabilité, l’anonymisation et la portabilité des données au sein de notre solution. Elle est le reflet d’une posture éthique assumée : la donnée client ne nous appartient pas, elle nous est confiée.
Ce choix peut sembler technique. En réalité, il est d'abord stratégique. Car dans un monde où la défiance numérique grandit, où les consommateurs prennent conscience de la valeur de leurs données, et où les marques cherchent à se différencier, la confiance devient un actif décisif. Et cette confiance ne se décrète pas — elle se prouve. Elle se démontre par des engagements concrets, audités, certifiés.
Notre approche s’oppose à celle de nombreux acteurs américains, dont les modèles économiques reposent encore sur une logique d’exploitation massive de la donnée, sans toujours garantir aux utilisateurs européens un respect strict des principes du RGPD. Dans ce contexte, la souveraineté numérique européenne ne relève plus du débat idéologique : elle devient un avantage concurrentiel. La donnée européenne — collectée de manière éthique, stockée localement, gouvernée de façon transparente — est un actif stratégique pour les entreprises qui veulent construire des relations durables avec leurs clients.
Concrètement, nous avons structuré notre solution autour de trois piliers :
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La transparence, en permettant aux utilisateurs de comprendre comment leurs données sont utilisées, et aux entreprises de documenter chaque traitement.
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L’anonymisation, pour garantir la protection des données sensibles tout en permettant l’analyse statistique et l’activation marketing.
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La portabilité, qui facilite le droit des clients à récupérer leurs données ou à les transférer vers d’autres services, sans friction.
Loin d’être des freins, ces piliers sont les fondations d’une data éthique et d’un CRM respectueux. Ce sont eux qui nous permettent de travailler avec des marques exigeantes, soucieuses de maîtriser leur chaîne de valeur — de la collecte à l’activation — sans compromis sur la conformité.
En sortant de la soirée EY, je me suis dit que ce cadre réglementaire européen, souvent vu comme pesant, est en réalité une opportunité. Une opportunité renforcée paradoxalement avec l'attitude outrancière de la nouvelle administration américaine. Les enjeux de souveraineté numérique devenant à nouveau prioritaire.
5. 👩🏻💻👨🏻💻Diriger une entreprise tech aujourd’hui.
Pour être très franc je ne m'attendais pas à une soirée aussi éclairante telle que fut la soirée EY Sustainable Future. Elle a été plus qu'u simple événement corporate, elle m’a ramené à une question simple mais essentielle : que veut dire être un dirigeant tech en 2025 ?
Ce que j’en retiens, c’est que diriger une entreprise technologique aujourd’hui ne peut plus se limiter à innover vite ou à scaler efficacement. Il faut donner du sens. Il faut assumer une part de responsabilité dans la manière dont nos outils façonnent les usages, les comportements, parfois même les déséquilibres.
Tout cela nous ramène à des sujets de gouvernance et à la notion de performance où il faut remplacer celle de la performance rapide, exigée par le marché, par celle de la responsabilité longue, exigée par notre époque.
Dans tous les cas Il y a un paradoxe à piloter une entreprise tech : on nous demande d’aller vite, mais aussi de réfléchir à l’impact de chaque ligne de code, de chaque architecture cloud, de chaque stratégie CRM. Ce n’est pas simple, mais c’est ce qui rend notre métier passionnant.
Heureusement, nous ne sommes pas seuls. Nos clients eux aussi avancent sur ce chemin. Certaines marques intègrent progressivement ces réflexions à leur stratégie CRM et Data Client. C'est d'ailleurs la société Clarins qui nous a montré l'exemple et convaincu de passer le label Ecovadis Elles nous challengent, nous questionnent, nous poussent à faire mieux. C’est un cercle vertueux : en accompagnant des entreprises exigeantes, nous élevons nous aussi notre niveau d’exigence.
Et concrètement, cela passe aussi par des choix technologiques : utilisation de clouds moins énergivores, optimisation des requêtes pour réduire la charge serveur, stratégies de stockage différenciées en fonction de la criticité et de la fréquence d’accès aux données. Ce sont des détails qui, à grande échelle, font une vraie différence. La tech ne doit pas être vue comme un problème, mais comme un levier puissant dans la transition environnementale, à condition qu’on la pilote avec lucidité.
En conclusion.
Une soirée indéniablement riche sur le plan intellectuel et qui a su, parfois avec beaucoup d'humour avec Lionel Subran, nous extirper des postures de bon aloi et des discours lénifiants pour passer à l'action sans se laisser influencer par ce qui se passe de l'autre côté de l'Atlantique.
c’est en cela que la soirée EY m’a marqué : elle a mis des mots sur ce que nous sommes nombreux à ressentir dans l’écosystème — cette volonté d’inventer une tech à impact, exigeante, mais profondément humaine
C'est, je crois, le seul chemin possible pour continuer à innover sans renier nos responsabilités.
C'est un enjeu d'avenir et pour l'avenir.