Dans un contexte où le trafic en point de vente est sous tension, les enseignes doivent tout faire pour sécuriser leur base clients et maintenir leur chiffre d’affaires.
Nous avons rencontré Éric Lebailly, expert des stratégies de fidélisation, pour comprendre pourquoi, selon lui, un bon programme de fidélité est aujourd’hui un actif clef, bien au-delà des seuls aspects transactionnels.
SOMMAIRE
1. Pourquoi remettre la fidélisation au cœur de la stratégie des retailers?
2. Quel est le oût d'un programme de fidélité et comment évaluer sa rentabilité?
3. Quel est le lien entre connaissance client et fidélité?
4. Quels sont les prérequis pour activer efficacement un programme de fidélité?
5. Quelles sont les prochaines étapes pour les enseignes qui veulent renforcer leur programme ?
Fourseeds : Pourquoi remettre aujourd’hui la fidélisation au cœur de la stratégie des retailers ?
Éric Lebailly : Parce que c’est un levier économiquement mesurable et activable à court terme, contrairement à beaucoup d’autres investissements marketing plus aléatoires, comme la communication média. Avec la fidélisation, vous partez de votre base de clients actifs. Vous savez qui ils sont, ce qu’ils achètent, à quelle fréquence, et vous pouvez orchestrer des actions concrètes pour les faire revenir. Aujourd’hui, il suffit en général que 20 % des clients d’une base fassent un achat supplémentaire pour rentabiliser un programme de fidélité. Et dans un contexte où le trafic baisse, travailler la réactivation est une priorité absolue.
Fourseeds : Quel est le coût d’un programme de fidélité et comment évaluer sa rentabilité ?
Éric Lebailly : En moyenne, un programme bien conçu coûte entre 0,5 % et 2 % du chiffre d’affaires. Ce n’est pas un budget négligeable, mais il est beaucoup plus “pilotable” qu’un budget pub, et le point mort est généralement atteint en 3 ou 4 ans. Le premier indicateur à regarder, c’est la couverture du chiffre d’affaires par les porteurs de carte (ou tout simplement clients adhérents s’il n’y a pas de support physique) : si vous n’identifiez que 45 % de vos ventes, votre programme est sous-optimal. L’objectif, c’est d’atteindre au moins 70 % de CA identifié dans le non-alimentaire, et 85 % dans l’alimentaire, où les cartes sont largement diffusées. À ce niveau, vous commencez à avoir un outil fiable de connaissance client, ce qui est fondamental.
Eric Lebailly - Expert Loyalty
Fourseeds : Justement, quel est le lien entre fidélité et connaissance client ?
Éric Lebailly : Le lien est total. Un programme de fidélité, ce n’est pas seulement un outil de récompense, c’est un moteur de collecte et d’activation de la donnée clients. Une enseigne comme Cultura, par exemple, s’appuie sur son programme pour segmenter ses clients par centres d’intérêt (lecture, musique, loisirs créatifs…) et personnaliser ses campagnes. L’IA permet aujourd’hui de croiser comportements, fréquence, valeur client, sensibilité au prix, et d’anticiper les risques de churn. C’est cette intelligence client qui permet d’optimiser les plans d’animation et d’investir au bon endroit.
Fourseeds : Un programme de fidélité n’est donc pas uniquement transactionnel ?
Éric Lebailly : Exactement. Un bon programme repose sur trois piliers :
C’est cette dimension émotionnelle qui crée la préférence à l’enseigne. Parce qu’au-delà de la proximité géographique, ce qui fait qu’un client revient, c’est qu’il a une expérience fluide, valorisante, différenciante.
Crédits - Envato
Fourseeds : Quels sont les prérequis pour activer efficacement un programme ?
Éric Lebailly : D’abord, avoir une base CRM propre, enrichie et exploitable. Ensuite, mettre en place une segmentation client basée sur leur valeur et leur typologie d'achat permettant d'envoyer des campagnes CRM ciblées et personnalisées. Enfin, il faut éviter de voir le programme comme une simple mécanique promotionnelle. Il doit porter la promesse de marque : est-ce que je fidélise sur le prix, sur le service, sur l’exclusivité ? La réponse dépend du positionnement.
Fourseeds : Et les prochaines étapes pour les enseignes qui veulent renforcer leur programme ?
Éric Lebailly : La priorité, c’est de réconcilier les données, les équipes et les canaux. La fidélité ne doit plus être un silo marketing. C’est un levier transversal, qui impacte les ventes, le digital, le service client. Les enseignes qui performent aujourd’hui sont celles qui ont fait de la fidélité un socle de leur stratégie client omnicanal.
Conclusion
La fidélité n’est plus un « plus » mais un pilier central de la performance retail. Pour en tirer le meilleur, il faut la penser comme une stratégie d’activation et de différenciation à part entière. En combinant data, personnalisation et émotionnel, les enseignes créent des expériences durables qui dépassent la simple transaction. Un enjeu majeur pour les enseignes dans un contexte économique incertain.
Merci à Eric pour cette interview et ses précieux retours d’expérience.